Parlons un peu de création monétaire. On va tâcher de rester simple. Primitifs.
Argent comme « Moyen »
Soit l’argent est un moyen, tout comme l’essence est un moyen de faire avancer la tuture, un moyen de reconnaissance de la valeur du travail, qui permet l’échange. Dans ce cas, l’argent ne prend sa valeur qu’au cours d’un échange. Un billet de 10 € vaut 3 centimes dans votre portefeuille ou sur votre compte en Banque. Il ne vaut dix euros que sur le comptoir d’une boulangerie quand vous venez de vous décider d’empiffrer pour 10€ de chouquettes. L’échange donne à cet instant précis la valeur de 10 € aux chouquettes du travail du boulanger, et dix Euros au temps passé à les gagner.
Dans ce premier cas, l’utilisation de la monnaie est « accessoire ». Il suffit qu’il y en ai assez pour « représenter » le travail.
La seule question concerne sa répartition et la modulation de son volume, en fonction du volume de travail qu’il doit représenter.
Exemple : ce mois ci 100 personnes travaillent. Salaire ou revenu non salarié, il va bien falloir disposer à la fin du mois de 100 revenus en argent, pour placer la « représentation » de son travail sur le compte en banque du travailleur. Mettons que les échanges ont lieu le mois suivant. Tant que l’argent est en quantité sensiblement égale au productions à vendre, les échanges ont lieu.
Si le mois suivant, congés payés mis à part, 50 travailleurs décident de glander. 50 équivalents en travail ne seront pas produits. Il est logique que ceux qui ont bullé ne reçoivent pas d’argent. D’autant plus que comme ils n’ont rien produit, pas vraiment besoin de cet argent pour acheter une production inexistante.
Notez que dans ce schéma, le producteur crée la monnaie avec son salaire. La monnaie avec laquelle LES AUTRES vont lui acheter son travail.
C’est le bug de cette version : le producteur crée avec ses revenus l’argent avec lequel LES AUTRES vont pouvoir lui acheter sa camelote. C’est cohérent avec le chapitre précédent. Mais celui qui produit le bien ET l’argent pour l’acheter s’expose à être le seul capable d’acheter sa production. Mais c’est la contrepartie d’une société qui réfute le don comme moyen d’échange.
Qui pose en préambule le chantage : tu auras de quoi survivre si tu viens travailler pour m’enrichir.
Préambule accepté. Si pas esclavage, alors pas survie. On a réussie à faire passer cette escroquerie pour un concept valable.
Argent Fin en soi
L’argent comme une fin en soi est vieux comme le monde. C’est plus clair si on va suffisamment en arrière dans notre histoire.
Au début des temps, on pratique l’ardoise, comme au troquet. Je te file des patates, tu me filera un cochon plus tard. Les échanges sont comptabilisés dans des dettes, qui fluctuent au fur et à mesure des échanges. Sans argent, le système marche bien dès lors qu’on peut dire qu’un cochon vaut tant de kilo de patates. Notez que les dettes représentent un mode de relation sociale : on ne se perd pas de vue, tant qu’il existe une interdépendance. Le contrat, à l’inverse, permet de faire des échanges entre personnes qui ne veulent pas avoir de relations. Signe là. En cas de problème, tu vois avec mes avocats.
Primitivement, l’argent sert au souverain à prélever de la richesse dans son royaume pour financer ses caprices de roi. Le roi décrète qu’il fabrique de l’argent, qu’il payera avec ce qu’il doit à ses fournisseurs, à ses soldats, et surtout, qu’il touchera ses impôts et taxes avec. L’argent devient un moyen de domination par un non producteur, sur les producteurs qu’il a décidé de racketter. Eh bé oui : une transaction où l’un donne quelque chose, et l’autre rien, ça s’appelle du racket. Et venez pas gémir « le contrat social » : on dirait le Medef qui promet des emplois !
A ce stade, l’argent est un outil de racket, pas encore une fin en soi.
Mais, très tôt, avant la monnaie, est apparu l’intérêt.
Autant un champ + un agriculteur + un cheval + des semences, ça fait du pain, faut quand même bosser pour transformer l’agitation des uns en l’autre !
Alors qu’avec l’intérêt, la rente, le dividende…….
Revenons au Monopoly : un gentil ingénu pourrait dire en début de partie : « Je m’achète un p’tit sam suffy, et pis à moi le hamac et les barbeuc de lézards ».
Eh bé non, même à dix ans, les gosses ont compris que le placement d’un argent primitif (celui de la distribution initiale) doit astucieusement permettre de gagner encore beaucoup plus de fric, pour au final acheter tout, et essorer tout le pognon des autres joueurs jusqu’à ce que mort s’ensuive (on dit « élimination »). Qui parle de se loger ? Je parle d’instinct de mort, consubstantiel du capitalisme.
Vous comprenez bien que dans ce cas, l’argent ne correspond pas à une production, à un travail.
L’argent sert uniquement de moyen de domination, comme un vulgaire gourdin : sa simple détention ou son usage sont productif de richesses prélevées sur le dos de ceux qui travaillent.
Tout notre édifice juridique sert à cela, et uniquement à cela : rédigé par les riches-branleurs, il écrit les mécanismes imposés par la force de la loi, qui obligent :
1) à considérer l’argent comme de la valeur (la valeur des revenus potentiels)
2) à accepter que l’inégalité fondamentale entre prêteur feignants et emprunteur aux abois est normale,
3) à respecter les règles des prêteurs, qui prévalent dès qu’un parti politique ou un de ses représentants est à vendre.
En revanche, les emprunteurs ne sont pas obligés de croire que cette configuration est la seule possible, et surtout la seule souhaitable.
Et si vous manquez de biftons pour jouer au Monopoly, vous avez le DROIT, si si !, de prendre des bouts de papiers et de décréter que c’est du fric. Ca vous fera en passant une bonne initiation aux problèmes du contrôle de la masse monétaire, qui lui, est sa biologie !
Tout ça, parce que vous avez cru, à force de regarder la télé de Bouygues, Dassault, Niel, Sarkolande, mais aussi Marine, Bayrou et autres, que le sens de la rotation de la terre, c’est d’obéir aux voleurs de travail, aux pollueurs du monde, aux esclavagistes.
Que les dettes « doivent être remboursées ».
Alors, ne perdez pas de temps : courez, roulez avec votre bagnole à crédit ou pire en « location longue durée » pour trimer dans une pyramide de pouvoir chapeauté par des actionnaires-branleurs.
Quand on passe son temps à sucer un banquier, on ne se plaint pas qu’il a un goût.