La Gauche fait semblant d’être de gauche
Après avoir fait une cure de Jean-Claude Michéa, je commence à avoir une bonne idée de ce qu’est la « gauche », et surtout de ce qu’elle n’est pas.
Elle est issue d’une alliance circonstancielle aux remous de l’affaire Dreyfus. A noter que la classe ouvrière, a été très peu enthousiaste à l’époque : une affaire de bourgeois qui se crêpent le chignon. Pendant ce temps, il fait toujours chaud à l’atelier et à la mine, mais le beau monde à Paris s’offre ses plus beaux élans d’humanisme. On décongèle Zola, soudain populiste, comme quoi tout arrive ! En fait, c’est la genèse de « Touche pas à mon pote ». La gauche, d’origine assez caviardisée et proto-germano-pratine, s’occupe déjà des causes abstraites, ouvrant un boulevard à un gouvernement drivé par une assemblée dont les membres sont tous l’équivalent de PDG et DG du CAC40. Plus Guy Sorman, Jacques Attali, et bon j’arrête.
La gauche est d’accord sur le postulat qu’il n’y a aucun problème dans la propriété lucrative, l’héritage et le pouvoir absolu des propriétaires de l’outil de travail sur toute la société. L’argent étant devenu un ‘outil de travail’ comme les fraiseuses et pelleteuses. La gauche est pour le business !
La Gauche a des principes à la con
Non. La gauche trouve seulement que le capitalisme n’est pas encore assez mature, que le système doit s’améliorer, et surtout, que le progrès technique va tout résoudre. C’est leur Balle d’Argent. Le tout dans un super appart à Paris, et pas trop de problème de compte courant. Et donc nous, nous ne sommes que des ‘bavures’ d’une machine encore mal réglée. C’est ballot.
Dès le début 1900, un type écrit (Robert Michels) que les syndicats, comme tous les systèmes de gouvernement représentatif, tendent à générer une oligarchie, qui se professionnalise, et qui finit ainsi, par l’illusion de la compétence, par couper les représentants des représentés. Une petite poignée de type auto- ou réciproquo-proclamés finissent par partir en figure libre… de suivre leur plan de carrière. C’est la tare génétique induite par l’élection. La droite invoque des « valeurs » pour réveiller le pathos de ses sympathisants, qui regrettent au fond la disparition des « liens sociaux ». Sauf que « valeur » est un mot fourre-tout. Au final on abouti à « la manif pour tous ». La gauche a besoin d’une marque distinctive : les droits de l’homme feront l’affaire, et surtout « la-lutte-contre-toutes-les-exclusions », comprendre « lutte contre tous les rites structurants », au nom de la croisade contre les guerres de religions, initié par les libéraux du 18ieme siècle.
Nous avons vécu avec l’idée que la gauche incarnait le bonheur des pauvres, pour contrer les maléfiques de droite qui eux travaillent pour les patrons. Erreur, grave erreur.
La gauche aussi travaille pour les patrons. Mais elle fait le ‘mariage pour tous’. Alors vous comprenez, c’est pas pareil. Houla ! mais alors c’est le grand vide sous nos pieds : devons nous faire un pas encore plus à gauche ?
La « Vraie Gauche » serait en fait fallacieusement appelée « Extrême Gauche » ?
Je sens que ça palpite.
Ben non. Besançenot veut rester dans l’euro et dans les traités européens. A gauche, c’est de la gauche ! Si c’était ce que notre imaginaire de gauche-Blum-36 nous suggère (des conneries!), alors les partis politiques et les syndicats devraient être les plus colossales entreprises d’éducation populaire ! En sont-ce ? (m’interroge-je)
C’est le concept droite-gauche qui est fallacieux. Arrêtons de parler de l’étiquette sur la boite, regardons la boite sans employer les mots ‘valises’ ou ‘nuages’ du vocabulaire mediatico-politruc
Retirons de nos pensées ces positionnements qui nous perdent, qui nous distraient, comme un string après un Paris-Sydney sans escale. Incroyable comment on peut retenir la foule à un seul stand de fête foraine, quand il y en a cent autres à coté à examiner.
OK, par la pensée en attendant mieux, on vire le raffut médiatique, on oublie les sourires d’affiche électorale. Peut-on penser par soi même, écrire ses propres lois, user de recours contre les abus de pouvoir ? Oui, mais sans Pujadas. Bien que les médias se soient attachés, avec un certain succès, à décrédibiliser le discours d’E. Chouard, l’idée de refaire une constitution fait son chemin dans les esprits : non comme une fin, mais comme un moyen. Déglinguer notre constitution pour en révéler le caractère vicieux, c’est pas compliqué, voila un exemple et c’est le meilleur, parce que c’est le mien.
Ca fait flipper, non ? Ca va être duraille de taper la concurrence avec Canteloup sur son segment de marché. Assez de suspense, j’ai LA solution, pour tout de suite. Ça ne peut que faire du bien, pour la suite quelle qu’elle soit.
Sans dec’, j’ai dit que j’avais LA solution
On nous a soigneusement appris à vivre seuls dans le cosmos. Famille, Patrie, Religion, pouah ! caca ! Tradition=moisi ! Ce que notre génération ‘gauchiste’ a adoré. La transgression comme fer de lance de l’évolution ! Hop récupéré par les pubards qui savent où gratouiller pour déclencher la pulsion d’achat. Du Spinoza à l’affiche.
En attendant, on est paumé chacun de son coté du net.
En fait, y fallait réviser les traditions, en changer, revoir les rapports de force. Pas les détruire avec rien d’autre à la place que la Loi et le Marché. Remettre en cause en bloc la religion en ignorant ce que ses rites ont de structurant dans la société, c’est retirer son squelette à un pitbull : remarquez j’aimerais vraiment voir ça, par magie. Allez-y, faites le par la pensée…..désossez un pit. Bon ok, notre société, aujourd’hui, ne pratique aucun rite démocratique susceptible de structurer un ‘Imperium’ (citer Lordon, ça, c’est fait…), une volonté commune capable, parce qu’elle est communauté de volontés. Si le mot rite vous irr.. gêne, mettez à la place « trucs qu’on fait ensemble, c’est l’occasion de discuter entre citoyens », vous faites comme vous voulez.
En fait, l’homme est tellement seul, flippé dans son coin, que la perspective de l’assemblée, de devoir parler en public, d’écouter les autres, de voter lui fout un trac pas possible. Oser affirmer une idée quelconque, sans passer pour un bolosse ! Oser prendre la parole, malgré Fourest, les Inrock, Télérama, malgré Cohn-Bendit, malgré Franz-Olivier Giesbert, malgré… Sous l’inquisition des nouveaux cerbères violents de la société du fric : les antifas, ridicules atrophiés du bulbe, qui pratiquent la violence politique du système avec un cerveau niveau CP.
Genre tu es dans les coulisses, toi lecteur !, tu portes un justaucorps rose, des collants, des chaussons de danse, un tutu blanc. Devant toi la perspective de la scène de l’Opéra Garnier, décorée et illuminée. L’orchestre joue. Une main ferme se pose sur ton dos et te propulse en avant vers la scène avec un « Vazy cocotte, déchires les tous ! ». Et tu te réveilles pas tout de suite.
Nous avons tellement dé-appris le commun, le collectif par la sainte alliance de Pujadas et de Cohn-Bendit, que même l’idée de communauté est cramée : alors qui va se lancer contre l’individualisme sans craindre l’ombre de Staline. L’ombre de Staline est une représentation pour repousser toute vélléité de discussion sur le commun : La gauche nous garde ainsi bien droit sur les rails de la consommation, de la soumission aux rapports de forces dans l’emploi. Ça ira mieux plus tard, c’est l’argument de base des gauchistes d’état, et de médias. Essayez de les doubler par leur gauche, et y’a la place, et c’est direct la Corée du Nord !
Bon, ça suffit, les titres racoleurs !
Nos cerveaux n’ont plus trace de ces « rites-qui-font-société ». La société n’en est plus une, elle n’associe plus personne, c’est la guerre de tous contre tous. C’est un assemblage juridiques d’agents qui cherchent chacun à augmenter le profit, soit en vendant plus cher, soit en achetant moins cher. Voila la bible de nos messes d’informations.
La bataille n’est pas de prime abord juridique. Elle réside dans un axiome à vérifier : « Une société est l’ensemble des ‘rites’ qui déterminent et maintiennent ensemble les volontés des ‘sociétaires' ». Cherchez pas, c’est de moi. Ce ne sont pas les règles d’état qui font les sociétés : au mieux les dictatures de l’argent. Ce sont les rites qui font société, et de cela découlent l’expression de ces rites, la constitution. C’est une expérience inédite, donc je joue sur du velours : jamais une constitution n’a été écrite par aucun peuple. L’ordre simpliste, c’est de subordonner une belle société, animés de beaux rites à la pré-existence d’une constitution ‘sympa’. Non, c’est faux : une société existe dès lors qu’elle partage à minima des rites de vie commune : fêtes, démarche législative, judiciaire, rencontres citoyennes, pratique du tirage au sort à chaque fois que c’est matériellement possible.
Aujourd’hui, il n’y a que des rites administratifs. Les rites anciens sont remplacés par Coca-Cola : les firmes ont détruits nos rites et y ont substitué des ‘actes’ de consommation. Les communautés qui spontanément continuent à pratiquer des rites sont les plus violemment attaquées par la gauche : la question n’est plus de discuter leur qualités ou leur défaut, leur perfection ou leur imperfection. Plus de rite ! Les rites c’est so 20ième ! Complètement has-been ! Sans compter que c’est une entrave à mon épanouissement personnel, qui ne saurait s’encombrer d’entraves idéologiques ou religieuses. Des rites soit-disant totalitaires, dont la complète éradication est en réalité le totalitarisme ‘en creux’.
Il ne s’agit donc pas de ressortir des vieux rites, anoblis par leur nature de rareté. Il y a des rites de merde. Mais « pas de rite du tout » est la réponse de gauche aux problèmes avec les rites. Y nous a bien niqués, Cohn-Bendit ! Arrosé tout petit à la neutralité axiologique, il en est le grossiste en France. La neutralité axiologique, c’est la réduction de toute transaction à son caractère utilitaire et légal. Avec la neutralité axiologique, la mondialisation s’opère sans contestation : c’est une optimisation technique. Les rites, c’est une perte de temps productif, et la porte ouverte à tous les courants d’airs et d’idées. La neutralité axiologique, c’est le concept propret qui permet de se comporter en affaire comme un gros enculé. C’est la recette magique pour vaporiser les sentiments, le respect, la compassion (de base !), la solidarité instinctive à l’homme, afin de permettre de saisir la moindre opportunité de faire bosser les autres pour soi.
Mettez vous en rangs !
Un bon truc facile, c’est l’éducation populaire. Sur ce site vous trouvez un choix par exemple de conférences éducatives. C’est un bout pour commencer. Une fois que c’est en route, ça roule tout seul. Faut « déclencher ». Après vous envoyez le lien à une connaissance, qui vous en reparle et ça continue.
Le but n’étant pas de vous faire adhérer à un programme, mais à vous donner l’occasion de comprendre la politique plutôt que de la subir. Apprendre à conduire, et on ne vous dit pas où aller.
Vous regardez, au début on est un peu perdu, prenez un Guillemin, tâchez d’avancer avec lui. Gaffe au coté ‘je picore !’, c’est pas des mémmémémsse. Ces séries visent à vous faire maturer et à partager avec vous un vocabulaire de base. Ce n’est pas un distributeur fun de vidéos !
Parfois, au loin une lueur… un rite politique
Ce que font les gars et filles aux « nuits debout » place de la république est admirable. Des Cévennes, j’ai du mal à être présent, mais quel kif ça doit être ! Est-ce une expérience d’éducation populaire ? Certes oui, même si celle-ci a lieu en périphérie : conférence sur internet, « Là-bas si j’y suis », « Arrêt sur Images », évidement, on ne compte pas sur TF1 ni Canal. Admettons, commençons par la jacasserie. C’est un rite parfaitement digne à mes yeux. Si cela débouche effectivement sur une éducation populaire, et ne reste pas, comme les médias y veillent, une représentation de contestation juvénile, sans contenu ni suite.
Attention à ne pas confondre débats, « jacasseries », rite de rencontres ‘citoyen’ (pour une fois ok pour le mot), et création politique. Ce qui se passe place de la Répu’ n’est que la moitié du sandwich. Nous n’avons pas à notre disposition un outil de maturation d’idées politique. Un outil sur Internet, par la force des choses, mais qui répond à des exigences très précises, afin de ne pas créer un lieu de jacasserie supplémentaire. J’ai tenté de discuter avec des militants, plutôt compétents techniquement, mais qui refusent d’aller plus loin qu’un Facebook spécialisé, une pompe à pouce-en-l-air ou pouce-en-bas, le degré zéro de la réflexion politique.
Et attention, Facebook est votre ennemi. Il vous fait confondre agitation pathologique et pratique politique. En effet, le nombre de ces gens (de ‘gauche’ ?), plutôt éduqués, jeunes, qui renâclent à se mater la série complète des Henri Guillemin, des Lepage, des Friot, des Ruffin : « ah j’ai pas le temps ! j’ai des trucs à faire… » Grosse feignasse ! C’est de ta vie d’esclave dont on parle ! et tu réponds « je peux pas, j’ai une vie d’esclave ! ». Et tu passes des heures par jour sur Facebook. Donc du temps, t’en as !
Faut-y que tu sois un lemming, un mouton, pour te ruer vers la falaise, pasque tu comprends, mec, j’ai pas le temps.
De toute façon, je sais que tu sais que je le sais. Tu me lis sur Internet.
Putain, font chier ceux qui lisent pas jusqu’au bout !
Tu me diras : ‘A quoi bon ?’