INDEXATION DES SALAIRES SUR LES PRIX
Il me semble que l’indexation des salaires sur les prix n’est pas comprise dans tous ses tenants et aboutissants.
Quant elle est en vigueur, l’employeur répercute obligatoirement l’inflation des prix à ses salariés.
La droite, les tenants de la concurrence et surtout du droit de voler sa vie aux gens qui bossent, parce que l’on possède l’outil de travail, est contre.
Je fais tout de suite une réserve :
L’inflation est calculée par l’INSEE selon un processus obscur : les biens ou services retenus pour son calcul sont gardés secret afin que nul commerçant/industriel ne puisse cibler ses augmentations de prix hors du champs de l’inflation-INSEE. Ne pas se faire remarquer.
Pas forcément idiot, sous réserve que les députés et sénateurs puissent avoir accès à la liste des produits surveillés. Est-ce le cas ?
Autre réserve, les prix relevés sont « rectifiés ». Exemple concret avec des chiffres caricaturaux pour qu’on comprenne bien : disons qu’en 2022 un smartphone « moyen » coûtait 300 €. En 2023 il coûte 320 €.
L’INSEE constate que le modèle 2023 est deux fois plus puissant : 5G, processeur plus rapide, écran plus net. Le client en a deux fois plus pour son argent. Donc le prix 2023 rectifié est de 160€, afin de rendre comparable ce qui ne l’est pas : une deux chevaux et une masérati. Idem les tablettes, ordi.
Donc l’amélioration technologique rendue obligatoire par les vendeurs qui se tirent la bourre, fait disparaître 160€ de dépenses réelles et tire l’inflation vers le bas. Or moi, les 160 balles, je les ai casquées !
Autre point : les mensualités des propriétaires endettés pour 30 ans, qui constituent de fait un « loyer », sont classées aux « investissements », et ne comptent pas dans l’inflation. Ce sont pourtant dans les deux cas des dépenses obligatoires. Si votre taux variable s’envole, ça ne se verra pas dans l’inflation. Et vos dépenses de logement, en moyenne sont supposées vous coûter 15% de vos revenus. Vérifiez vous-même. Puisque tous les propriétaire sont réputés n’avoir que 0%…. Les moyennes, c’est de la merde !
Bref, a regarder la proposition d’indexer les salaires sur l’inflation, on oublie le calcul questionnable. De plus, selon votre niveau de revenu, vous n’êtes pas impactés de la même façon par une augmentation donnée. Quelqu’un qui gagne 5000€ ou plus par mois ne vit pas de la même façon la hausse du prix des carburants qu’un smicard. Berruyer sur sa chaîne Elucid calcule que 12% d’inflation moyen, ça en fait moins de 8 pour les 10% aux plus gros revenus, et 25% pour les personnes dans les 10% les moins dotés en revenu.
Bon, imaginons pour la suite que l’indice INSEE est sincère et loyal.
Mettons de côté les augmentations liées aux importations obligatoires : le pétrole, les métaux etc.
Ce sont des causes externes qui ne relèvent pas de ce billet.
Allons-y !
Il y a ceux qui déterminent les tarifs, les prix et ceux qui doivent s’y plier.
Que Total augmente son chiffre d’affaire du montant de l’augmentation de ses importations, c’est une chose. A condition qu’un pétrole extrait par Total en Afrique par exemple justifie son augmentation. Si les coûts à l’extraction n’ont pas bougé chez Total Nigéria ou Total Ouganda, pourquoi Total Raffinage et Total Distribution payent plus cher DONC nous payons plus cher ? Or le jeu d’une multinationale, c’est que la holding augmente le tarif d’une unité de production, juste comme ça, pour que la filiale dans un pays importateur paye plus cher, ce qui sera répercuté aux consommateurs. Et c’est le populo qui paye l’augmentation proportionnelle de la taxe intérieure sur les produits pétroliers (TIPP)
Y’a rien qui vous choque dans le paragraphe précédent ? J’ai dis qu’une augmentation d’un produit de base d’un transformateur en France devrait légitimement causer une hausse de chiffre d’affaire, mais j’ajoute : en aucun cas une hausse du bénéfice !
Il y a des gens qui ont le pouvoir de choisir les prix pour s’assurer un maximum de revenus. Si ce sont les produits de bases comme l’eau, l’électricité, le carburant, les télécoms, le transport des marchandises, le logement, voila l’inflation qui se met en route.
Comme le boulanger voit ses coûts d’électricité s’envoler, pour ne parler que de cela, la baguette augmente. Inflation des abonnements eau, adsl, électricité donc aussi les transports en train….. Le haut de la pyramide des nécessités vitales tire les prix vers le haut, et comme les vases communiquent, c’est bien le bas de la pyramide qui paye les premiers maillons (le boulanger) qui va lui casquer la note d’électricité. Engie, lui, ne consomme pas structurellement d’électricité.
La spirale est la suivante : je fais stagner ou baisser les salaires parce que je peux, j’augmente mes tarifs parce que je peux, et je me fais un fric fou.
C’est notre vie aujourd’hui.
Mettons en place maintenant l’indexation des salaires : J’augmente mes tarifs, mais mes employés me coûtent proportionnellement plus cher. Ça tend à atténuer l’effet d’aubaine.
On observera que l’effet de l’indexation des salaires sur les prix, sur la politique des prix de l’entreprise, sera différent selon que la boîte a une part importante de dépense salariale par rapport à son chiffre d’affaire ou pas.
Le boulanger et ses clients, les deux derniers maillons vont en chier de toute façons plus que les boîtes au dessus dans la chaîne alimentaire du capitalisme. Plus qu’une entreprise de BTP qui rémunère du monde. Elle-même plus que Bouygues qui est son donneur d’ordre sans maçon. Et que dire des sociétés d’ingénierie financière qui travaillent le pognon avec des ordis.
Cette fameuse indexation des salaires sur les prix doit être aussi examinée sur ses causes, en détail, en donnant des noms de profiteurs.
Exemple : en 1973 le prix du pétrole explose. L’industrie musicale du disque double ses tarifs quelques mois plus tard, pour le seul support à l’époque, les disques en vinyle. Les carburants et les plastiques dépendent du pétrole.
Jusqu’à ce qu’un d’entre nous (étudiants à l’époque) vérifie : le vinyle n’est pas fait avec du pétrole. On s’est tous fait bien niquer. On commence avec de l’éthylène et du dichlore, on met le tout sous pression, puis on chauffe (beaucoup) sous (forte) pression etc…
L’Indexation des salaires sur les prix est le moins qu’on puisse faire, mais pensez au mode calcul de l’indice des prix de l’INSEE et au far ouest du marché, religieusement tenu pour légitime à former les prix. Sans compter que son effet est par nature très variable selon votre place dans l’échelle des revenus.
Pour nous tous, l’offensive est dans le déboulonnage des causes, une question de système économique et de structure autoritaire qui le garde en vie : l’état entre les mains du marché. C’est un héritage d’un passé jamais questionné.
Cette indexation etc. n’est qu’un pansement provisoire impérieusement nécessaire malgré qu’il soit percé et très variablement efficace.
Jouez en attaque, s’il vous plaît, et de moins en moins en défense !